Séminaire LNPL "Silences endophasiques. Linguistique clinique et langage intérieur", Stéphanie Smadja (PLH, UT2J)

Résumé. Comment articuler langage et silence intérieurs ? Il est plusieurs façons d’aborder cette question. D’abord, l’une des interrogations qui orientaient ma réflexion dans mon second volume de Pour une grammaire endophasique était celle de savoir si le langage intérieur correspond au modèle syntaxique rendu célèbre par Vygotski (modèle que j’appelle Vygotski-Egger, puisque Egger l’a évoqué avant Vygotski) et si fréquemment repris : la syntaxe endophasique est-elle toujours, et fondamentalement, condensée, abrégée, fragmentaire et décousue ? Le rythme endophasique est-il principalement constitué de silences et d’interruptions ? Ensuite, les silences endophasiques ne sont pas fréquents et peuvent constituer l’essentiel du langage intérieur d’un individu, d’après ses représentations métaendophasiques du moins. Bien plus, le silence intérieur est parfois recherché, lorsque parole semble trop présente, trop bruyante en quelque sorte. Enfin, le silence intérieur peut correspondre à ce que Jeanine Rochefort, médecin, ancienne responsable de la délégation Île de France de Médecins du Monde appelle la « parole intérieure interdite » : ce que l’on ne dit pas aux autres mais que l’on ne se dit même pas à soi-même. Les ellipses et les silences d’un langage intérieur marqué par des traumatismes, qui subsistent à travers des symptômes linguistiques endophasiques. C’est ce point que je propose de développer plus particulièrement, en évoquant l’un des protocoles de linguistique clinique expérimenté au Centre d’Hébergement d’Urgence à Ivry et centré sur le traitement du stress post-traumatique pour des femmes qui ont émigré seules, ou avec des enfants.

Stéphanie Smadja est professeure au laboratoire Patrimoine, Littérature, Histoire (PLH), plus de détails ici.